4 maart 2022

Dans le cadre d’une authentification notariale de la constitution d’une SA, l’ICCI est interrogée sur la question de savoir si un rapport sur l’apport en nature par constitution, dressé par un réviseur luxembourgeois peut être utilisé et si, dans le cadre de cette opération, il est possible de se référer à un rapport de réviseur valorisant la société dont les parts sont apportées non spécifiquement dans le cadre de l’apport à réaliser.

 

 

  1. La question suivante est posée:

     

    « Je suis chargé d’authentifier la constitution d’une SA. Il est prévu de réaliser un apport en nature de parts d’une société luxembourgeoise pour un montant substantiel.

     

    Les parties voudraient réaliser cette constitution sur base d’un rapport dressé par un réviseur luxembourgeois, rapport non spécifiquement réalisé dans le cadre de l’apport (elles souhaitent, en effet, faire état du §2 de l’article 7 :7 du Code qui permet de se passer d’un tel rapport quand il s’agit « 2° d'éléments d'actif autres que les valeurs mobilières et instruments du marché monétaire visés au 1°, qui ont déjà été évalués par un réviseur d'entreprises (…) »).

     

    Pourriez-vous me faire savoir si vous êtes d’avis :

    1°     qu’un rapport dressé par un reviseur luxembourgeois peut être utilisé à cette fin. Je ne vous cacherai pas que j’ai des doutes à ce sujet ;

    2°     que, dans le cadre de cette opération, il est possible de se référer à un rapport de réviseur valorisant la société dont les parts sont apportées non spécifiquement dans le cadre de l’apport à réaliser. ».

     

  2. L’article 7:7, § 2, alinéa 1er, 2° du CSA dispose que :

     

    « § 2. Le paragraphe 1er n'est pas applicable lorsqu'un apport en nature est constitué:

    (…)

      2° d'éléments d'actif autres que les valeurs mobilières et instruments du marché monétaire visés au 1°, qui ont déjà été évalués par un réviseur d'entreprises et pour autant qu'il soit satisfait aux conditions suivantes:

      a) la juste valeur est déterminée à une date qui ne précède de plus de six mois la réalisation effective de l'apport;

      b) l'évaluation a été réalisée conformément aux principes et aux normes d'évaluation généralement reconnus pour le type d'élément d'actif constituant l'apport; ».

     

    Enfin, conformément à l’article 7:7, § 2, alinéa 2, 2° du CSA, il conviendra dans tous les cas d’établir un rapport de révision sur l’apport en nature si des circonstances nouvelles sont apparues qui sont susceptibles de modifier sensiblement la juste valeur de l’élément d’actif à la date effective de son apport.

  3. En ce qui concerne cette deuxième exception à l’établissement d’un rapport de révision sur l'apport en nature, l’ICCI se  réfère à l’avis 2021/11 du Conseil de l’Institut des réviseurs d’entreprises , qui stipule à la page 5 :

     

    « La deuxième exception prévoit qu'il peut être dérogé à l'obligation d'établir un  rapport de révision sur l'apport lorsque celui-ci porte sur des éléments d’actif autres que des valeurs mobilières et instruments du marché monétaire qui ont été évalués  par un réviseur d'entreprises au maximum dans les six mois précédant l'apport, et ce  conformément aux principes et aux normes d'évaluation généralement reconnus  pour la catégorie concernée d'éléments d'actif constituant l'apport (telles que, par exemple, les « international valuation standards » et « international private equity  and venture capital guidelines »).

     

    Sur proposition de la Commission juridique, le Conseil est d’avis que la pratique selon laquelle une société ferait appel à un réviseur d’entreprises pour l’établissement d’une évaluation permettant de contourner l’obligation de devoir recourir à l’obtention du rapport révisoral sur l’apport en nature, peut être considérée comme une fraude à la loi. Par conséquent, une telle pratique ne saurait être admise. 

     

    Par ailleurs, le Conseil de l'Institut attire l’attention sur la nécessité pour le professionnel d’interpréter le rapport de valorisation à la lumière de l’objectif pour lequel il a été établi. »

     

    Ensuite, l’ICCI renvoie à la conclusion du même avis 2021/11 du Conseil de l’IRE (p. 7), qui énonce :

     

    « Tenant compte des développements formulés ci-dessus, d'une manière générale et mis à part l'exception relative aux valeurs mobilières (à appliquer toutefois avec la prudence requise), les exceptions à l'émission d'un rapport relatif à un apport en nature ne peuvent trouver à s'appliquer que rarement. A cet égard, le commissaire veillera à s'assurer que les exceptions à l'émission d'un rapport d'apport en nature ne sont pas utilisées de manière inappropriée, auquel cas il constatera une violation aux dispositions du Code des sociétés et des associations, qui devra être renseignée en deuxième partie de son rapport de révision portant sur les comptes annuels de la société concernée. ».

     

  4. De manière générale et conformément au droit européen, l’ICCI estime qu’il est, a priori, possible de se référer à un rapport d’un réviseur luxembourgeois à cette fin.

     

  5. Toutefois, de ce qui précède, l’ICCI est d’avis que, dans le cadre de cette opération et afin de pouvoir utiliser la deuxième exception à l’établissement d’un rapport de révision sur l’apport en nature comme indiqué dans l’article 7:7, § 2, alinéa 1er, 2° du CSA susmentionné, il est nécessaire que toutes les conditions suivantes soient cumulativement remplies :

 

-        il existe une détermination de la juste valeur de l’élément d’actif qui fait l’objet de l’apport (1) ;

-        le rapport dressé par le réviseur luxembourgeois ne date pas de plus de six mois à partir de la date de la réalisation effective de l’apport ;

-        aucune circonstance nouvelle n’est apparue qui est susceptible de modifier sensiblement la juste valeur de l’élément d’actif qui fait l’objet de l’apport à la date de la réalisation effective de l’apport ;

-        l’évaluation de l’élément d’actif qui fait l’objet de l’apport a été réalisée conformément aux principes et aux normes d'évaluation généralement reconnus pour le type d'élément d'actif constituant l'apport (2;

-        le rapport dressé par le réviseur luxembourgeois est un rapport d’audit (qui ne contient pas en soi une attestation avec réserve, même si cet élément n’est pas repris explicitement à l’art. 7:7, § 2, al. 1er, 2° CSA). 

 

Enfin, l’ICCI peut suggérer de conditionner, au niveau du notaire, l’acceptation de l’exception à la confirmation, dans le rapport justificatif de l’organe d'administration, que toutes les conditions susdites sont remplies.


[1] ) La définition de la notion de la juste valeur ou de la valeur réelle a été reprise dans l’article 3:91, B de l’arrêté royal du 29 avril 2019 portant exécution du Code des sociétés et des associations : « Il y a lieu d'entendre par juste valeur : la valeur déterminée par référence à :

 a) une valeur de marché, dans le cas des instruments financiers pour lesquels un marché fiable est aisément identifiable. Lorsqu'une valeur de marche ne peut être aisément identifiée pour un instrument donné, mais qu'elle peut l'être pour les éléments qui le composent ou pour un instrument similaire, la valeur de marché peut être calculée à partir de celle de ses composants ou de l'instrument similaire, ou

 b) une valeur résultant de modèles et techniques d'évaluation généralement admis, dans le cas des instruments pour lesquels un marché fiable ne peut être aisément identifié. Ces modèles et techniques d'évaluation garantissent une estimation raisonnable de la valeur de marché. ».

(Cf. également avis CNC 2013/16 du 27 novembre 2013 « Indications à publier dans l’annexe en cas de non-utilisation des règles de l’évaluation à la juste valeur pour les instruments financiers », Bull. CNC 2013, n° 67, p. 27-28, https://www.cnc-cbn.be/fr/avis/indications-a-publier-dans-lannexe-en-cas-de-non-utilisation-des-regles-de-levaluation-a-la, p. 2-3).

IFRS 13 définit la juste valeur (fair value) comme le prix qui serait perçu à l’occasion de la vente d’un actif, ou le prix qui serait payé pour transférer une dette, dans le cadre d’une opération conclue à des conditions normales entre des intervenants de marché, à la date de l’évaluation.

[2] ) Telles que, par exemple, les « international valuation standards » et « international private equity and venture capital guidelines » (Rapport au Roi précédant A.R. 8 octobre 2008 modifiant le Code des sociétés conformément à la Directive 2006/68/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 septembre 2006 modifiant la  Directive 77/91/CEE du Conseil en ce qui concerne la constitution d'une société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital (M.B. 30 octobre 2008)).

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