8 janvier 2021

Si une société est détenue en cascade par une personne morale de droit public, faut-il remonter jusqu'à l'actionnaire ultime qui correspond toujours à une personne physique ?

Qui doit fournir les informations pour satisfaire aux exigences visées dans l’article 1:35 CSA ?

Lorsque le bénéficiaire effectif ultime de l’entité est une personne politiquement exposée, les mesures de vigilances accrues visées à l’article 41 de la loi anti-blanchiment doivent-elles être mises en place par les réviseurs d’entreprises ?

 

 

  1. La situation suivante est décrite :

     

    « La question qui est posée concerne "le bénéficiaire effectif" (articles 1:33 à 1:36 du CSA) et les implications que cela peut induire notamment au niveau des travaux à réaliser par rapport aux personnes politiquement exposées (PEPS).

     

     

    Dans la pratique, et c'est le cas pour d'autres structures détenues par des personnes de droit public, il n'est en général pas démontré, ni clair que ces personnes morales "majoritaires" de droit public ou encore "la Région", exercent un pouvoir quelconque dans la gestion de l'entreprise contrôlée.

     

    Les questions qui se posent sont donc de plusieurs ordres:

     

    -         Si l'on consulte les FAQ sur l'UBO, les sociétés détenues directement ou indirectement par la Région (ou les Régions), il est bien précisé qu'il faut identifier les personnes qui exercent les droits associés aux actions (plus de 25%); inévitablement, nous allons toujours arriver à un Ministre de tutelle ou le Gouvernement; il est d'ailleurs toujours difficile de démontrer que ces personnes exercent un pouvoir réel sur la gestion réelle de l'entreprise (bien que cet aspect ne soit pas visé par la législation UBO); Pouvez-vous confirmer que cette analyse est correcte et que si une société est détenue en cascade par une personne morale de droit public, il faut remonter jusqu'à l'actionnaire ultime qui de fait devient alors une ou plusieurs personnes physiques? N'est-il pas possible de s'arrêter au Holding intermédiaire?

    -        Si nous partons du principe que le ou les Ministres sont les UBO, l'IRE ou l'ICCI ne pourrait-il pas, dans un soucis d'éviter de solliciter de manière intempestive les secrétariats des différents gouvernements, initier une démarche afin d'avoir les coordonnées identitaires des différents Ministres, coordonnées qui seraient accessibles par les différents cabinets d'audit, de manière sécurisée par exemple? Ou bien dispenser les réviseurs d'entreprises d'avoir les données identitaires des Ministres de tutelle dans les cas de figure exposés ci-dessus (il faut parfois reconnaitre que nos clients n'ont même pas ce contact direct).

    -        Si par ailleurs vous confirmez que l'UBO est bien un Ministre (même s'il n'intervient jamais), nous arrivons alors dans le cas de figure où les travaux à mettre en œuvre pour les PEPS doivent être initiés ce qui dans la quasi-majorité des cas n'aurait aucun sens; En clair, nous devrions mener des travaux dans le cadre de la Loi anti-blanchiment qui seraient totalement en décalés par rapport au dossier d'audit lui-même. ».

     

  2. Afin de répondre à la première question, l’ICCI souhaiterait se référer à l’article 4, 27° de la loi du 18 septembre 2017 relative à la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et à la limitation de l'utilisation des espèces (ci-après loi anti-blanchiment ») qui définit les bénéficiaires effectifs de la manière suivante : « la ou les personnes physiques qui, en dernier ressort, possèdent ou contrôlent le client, le mandataire du client ou le bénéficiaire des contrats d'assurance-vie, et/ou la ou les personnes physiques pour lesquelles une opération est exécutée ou une relation d'affaires nouée. (…) ».

     

    L’ICCI confirme donc que votre analyse est correcte : si une société est détenue en cascade, par une personne morale de droit public, il faut remonter jusqu’au bénéficiaire effectif ultime qui correspond toujours à une personne physique. Néanmoins l’ICCI souhaiterait ajouter que tous les intermédiaires doivent être déclarés au registre UBO, conformément à l’article 3, 14° de l’arrêté royal du 30 juillet 2018 relatif aux modalités de fonctionnement du registre UBO (ci-après « AR UBO »).

     

    Cette règle se justifie par le fait que la réglementation anti-blanchiment a pour objectif la découverte de différentes activités criminelles. Cette notion est définie à l’article 4, 23° de la loi anti-blanchiment, et comprend, entre-autres, le détournement par des personnes exerçant une fonction publique et la corruption.

     

  3. Afin de répondre à la deuxième question, l’ICCI souhaite attirer l’ attention sur le fait que l’article 1:35 du Code des sociétés et des associations (ci-après « CSA ») prévoit que c’est au bénéficiaire effectif de fournir à l’entreprise ou à la personne morale dont il est bénéficiaire toutes les informations dont cette entreprise et cette personne morale ont besoin pour satisfaire aux exigences visées dans ce paragraphe.

     

    L’organe d’administration est ensuite tenu de transmettre ces informations au Registre des bénéficiaires effectifs (art. 1:35, al.2 CSA) mais également aux entités assujetties et donc aux réviseurs d’entreprises (art. 1:35 in fine CSA).

     

  4. Enfin, pour répondre à la troisième question, l’ICCI  confirme que lorsque le bénéficiaire effectif ultime de l’entité est une personne politiquement exposée, les mesures de vigilances accrues visées à l’article 41 de la loi anti-blanchiment doivent être mises en place par les réviseurs d’entreprises.