17 avril 2018

Un client souhaite distribuer un dividende intercalaire après le 31 décembre mais avant l'approbation des comptes de l'exercice clôturé en parlant d'un « dividende de printemps ». Pour ce faire, il prélèverait la totalité de la réserve disponible et du résultat reporté de l'exercice antérieur (au 31 décembre 2016) mais il prélèverait aussi sur (une partie du) résultat de l'exercice clôturé (au 31décembre 2017).

Cette distribution est-elle autorisée et simplement déconseillée ? Si elle est documentée dans le rapport de gestion, sera-ce suffisant ?
  1. Dans son arrêt du 23 janvier 2003, la Cour de Cassation ([1]) a clairement établi que l’assemblée générale peut, dans le courant de l’exercice et dans les limites de l’article 617 du Code des sociétés, décider à tout moment de distribuer aux actionnaires un dividende prélevé sur les réserves disponibles, plus communément appelé un dividende intercalaire ([2]).

    Il découle de cet arrêt qu’une assemblée générale peut de toute évidence, et bien évidemment dans les limites de l’application de l’article 617 du Code des sociétés, décider à tout moment de distribuer un dividende par prélèvement sur les réserves disponibles telles qu’elles résultent des comptes annuels à la date de clôture du dernier exercice ([3])

  2. Il convient néanmoins de noter que dans son avis 2009/1, qu’elle a établi au départ de l’arrêt de la Cour de cassation précité, la Commission des normes comptables (ci-après la CNC) estime qu’il ne s’indique pas de distribuer un dividende intercalaire entre la date de clôture de l’exercice et celle de l’approbation des comptes annuels par l’assemblée générale statutaire, et ce pour deux raisons :

« d’une part, dans ce cas, il ne serait pas tenu compte, dans les comptes annuels relatifs au dernier exercice approuvés par l’assemblée statutaire, du dividende intercalaire distribué. Par conséquent, les comptes annuels qui seraient publiés ne reflèteraient pas, au moment de leur approbation, la situation réelle de la société. Afin d’éviter cette anomalie, il s’indique, de l’avis de la Commission, d’observer une période d’attente entre la date de clôture de l’exercice et celle de l’approbation des comptes annuels par l’assemblée statutaire ;

d’autre part, les consignes contenues dans l’article 617 du Code des sociétés. s’appliquent également au dividende intercalaire. En vertu de celles-ci, l’actif net sera déterminé “à la date de clôture du dernier exercice". Aussi longtemps que les comptes annuels tels qu’arrêtés ne seront pas approuvés, il ne sera pas possible de déterminer, sur base des comptes annuels relatifs au dernier exercice, l’actif net à la date de clôture de celui-ci. De l’avis de la Commission, il doit s’agir des comptes annuels approuvés. En effet, dans l’hypothèse d’un projet de comptes annuels, les capitaux propres tels que constatés par l’assemblée générale, pourraient bien s’écarter de ceux présentés dans ce projet, en raison, par exemple, d’une adaptation des règles d’évaluation demandée par l’assemblée générale. ».

Il ne fait aucun doute que la jurisprudence de la Cour de cassation prévaut sur les avis de la CNC. Toutefois, dans la mesure où la position de la CNC n’est pas contraire à l’arrêt du 23 janvier 2003, et dès lors que les avis de la CNC constituent une source doctrinale importante faisant autorité en matière comptable, il est recommandé, dans la mesure du possible, de s’y conformer, même si ces avis
n’ont, par eux-mêmes, aucune force obligatoire ([1]).


1. En d’autres termes, et pour reprendre les mots ci-dessous, l’ICCI est d’avis que procéder à la distribution d’un dividende intercalaire entre la date de clôture de l’exercice et celle de l’approbation des comptes annuels par l’assemblée générale est autorisé mais déconseillé.

2. Si cette distribution d’un dividende intercalaire a effectivement lieu entre la date de clôture de l’exercice et celle de l’approbation des comptes annuels par l’assemblée générale, l’organe de gestion devra alors, conformément à l’article 96, § 1er, 2° du Code des sociétés, reprendre cette information dans le rapport de gestion, puisque celle-ci constitue un évènement important survenu après la clôture de l’exercice. Il conviendra également de reprendre cette information dans les annexes aux comptes annuels au niveau des « Droits et engagements hors bilan » sous la rubrique « Nature et impact financier des évènements significatifs postérieurs à la date de clôture, non pris en compte dans le bilan ou le compte de résultats » (vol 6.14 de la version BNB 15.07.2016).

Il reviendra alors au commissaire, conformément à la norme ISA 706([1]), d’introduire dans son rapport un paragraphe visant à attirer l’attention sur le dividende intercalaire qui sera décrit dans le rubrique susmentionné des comptes annuels ainsi que dans le rapport de gestion.


 

([1]) ISA 706, « Paragraphes d'observation et paragraphes relatifs à d'autres points dans le rapport de l'auditeur indépendant », https://www.ibr-ire.be/nl/regelgeving/normen_en_aanbevelingen/isas/Documents/ISA%20update%202015/French/ISA%20706-%20Mars%202012.pdf.

 



 

([1]) Avis CNC 14-1, « Compétence d’avis », http://www.cnc-cbn.be/files/advice/link/FR_014_01.pdf.

 




 

([1]) Cass., 23 janvier 2003, http://www.cass.be, D.A.O.R. 2002, 366, J.D.S.C. 2004, 145, note, J.D.S.C. 2004 (résumé), 243, note, J.L.M.B. 2003, 1252, J.T. 2004, 155, note A. Bertrand, Journ. Jur. 2003 (weergave), afl. 21, 14, NjW 2004, 52, note H. De Wulf, Pas. 2003, 173, R.C.J.B. 2003, 557, note D. Willermain, Rev. prat. soc. 2003, 379, note M. De Wolf, T.B.H. 2003, 836, note D. Heenen, T.R.V. 2003, 541, note R. Tas, T.R.V. 2003, 497-519.

 

([2]) Avis CNC 2009/1 du 14 janvier 2009, « L’acompte sur dividende face au dividende intercalaire », p. 4, http://www.cnc-cbn.be/files/advice/link/AVIS_CNC_2009_1.pdf.

 

([3]) Avis CNC 2009/1 du 14 janvier 2009, « L’acompte sur dividende face au dividende intercalaire », p. 4, http://www.cnc-cbn.be/files/advice/link/AVIS_CNC_2009_1.pdf.