19 août 2014

Est-ce que la pratique mentionnée ci-dessous est légale et y-a-il un avis de l’IRE à ce sujet ? Comment est donnée la décharge au commissaire dans ce cas ?

 

On a eu l’occasion de lire le rapport d’un commissaire daté de près de trois semaines après l’assemblée générale ordinaire (AGO) qui a approuvé les comptes de la société et mentionnant dans les mentions complémentaires simplement que les délais en matière de remise des comptes annuels au commissaire n’avait pas été respectés et que ceux-ci avaient été remis après l’AGO.


L’ICCI analyse ci-après la situation sous ces différents aspects.

 

Le rapport de carence

Dans le cas qu’on soumet, le commissaire aurait dû émettre, en temps utile, un rapport de carence. Ensuite, le commissaire aurait dû faire référence à ce rapport de carence dans son rapport définitif. Pour plus d’informations concernant les règles en matière de rapport de carence, L’ICCI renvoie à la brochure ICCI n° 2013/3, Le rapport du commissaire (Anvers, éd. Maklu, 2013, p. 18) :

 

« Conformément au paragraphe 62 de la norme complémentaire aux normes ISA applicables en Belgique, le commissaire est tenu, dès qu’il constate que l’assemblée générale ne délibère pas sur les comptes annuels dans les six mois après la date de clôture de l’exercice, d’émettre sans délai un rapport de carence destiné à l’assemblée générale.

 

Dans les autres cas, la date d’émission et l’usage du rapport en carence relèvent du jugement professionnel à appliquer par le commissaire. Le non-respect par l’organe de gestion des délais mentionnés dans les statuts doit être apprécié à la lumière du préjudice qui peut être causé. ».

 

N’ayant pas eu communication du rapport auquel on fait allusion, l’ICCI n’a pas vérifié si le commissaire y a fait référence à un rapport de carence. Si le commissaire n’a pas émis de rapport de carence et/ou s’il n’y a pas fait référence dans son rapport définitif, les actionnaires pourraient estimer qu’ils ont subi un préjudice du fait qu’ils n’étaient pas informés par le commissaire des raisons de l’absence de son rapport lors de l’AGO. L’ICCI pense cependant qu’une telle situation ne serait pas de nature à mettre en cause la responsabilité du commissaire.

 

En effet, même si le commissaire a commis une erreur technique en n’émettant pas son rapport de carence, les actionnaires étaient parfaitement en mesure de constater l’absence du rapport de commissaire lors de l’AGO. Les actionnaires avaient dès lors la possibilité de refuser d’approuver les comptes annuels tant qu’ils n’étaient pas accompagnés du rapport du commissaire.

 

La date du rapport du commissaire

Conformément à nos normes professionnelles, le rapport du commissaire doit être daté du jour où il termine l’essentiel de ses travaux. N’ayant pas d’informations sur le cas que vous citez, l’ICCI ne peut pas se prononcer sur la question de savoir s’il était correct que le commissaire date son rapport près de trois semaines après l’AGO. Cependant, compte tenu de ce que les comptes annuels ont été remis au commissaire après l’AGO, il n’était pas possible pour celui-ci de dater son rapport avant l’AGO. Si dans une telle situation, le commissaire datait malgré tout son rapport avant l’AGO, il commettrait un faux en écriture et se rendrait, par ailleurs, complice d’une infraction commise par le conseil d’administration. Sous réserve d’autres éléments qui seraient inconnus à l’ICCI, l’ICCI pense pouvoir conclure que le commissaire n’a pas commis de faute en datant son rapport après l’AGO et n’aurait d’ailleurs pas pu agir différemment.

  

La décharge au commissaire

En ce qui concerne la décharge au commissaire, celle-ci est valable conformément au deuxième alinéa de l’article 554 du Code des sociétés lorsque les actes commis en dehors des statuts ou en contravention du Code des sociétés sont spécialement indiqués dans la convocation de l’assemblée générale ordinaire. Selon la Commission juridique de l’Institut des Réviseurs d’Entreprises (IRE), « spécialement indiqués dans la convocation » ne signifie pas nécessairement que lesdits actes doivent être énumérés textuellement dans la convocation. Un renvoi aux annexes de celle-ci est considéré comme suffisant.

 

Plus d’informations à ce propos sont disponibles au point 3.2.6. de la publication ICCI 2012/3, Un aperçu des avis de la Commission juridique de l’Institut des Réviseurs d’Entreprises (1988-2012) (Anvers, éd. Maklu, 2012, p.60 e.s.).

 

Si le commissaire a émis un rapport de carence, l’ICCI estime en toute hypothèse que la décharge est valable, même si ce rapport de carence n’a pas été communiqué à l’AGO, car c’est le conseil d’administration et non le commissaire qui est responsable de la communication de tous les documents à l’AGO.  Si le commissaire était présent à l’AGO, il aura sans aucun doute attiré l’attention des actionnaires sur (i) son rapport de carence et (ii) les infractions constatées, dont la non-remise des comptes annuels.  Si le commissaire n’était pas présent à l’AGO (parce qu’il n’aurait pas été convoqué), il ne pourra constater l’infraction de non-communication du rapport de carence qu’a posteriori lorsqu’il prendra connaissance du procès-verbal de l’AGO.

 

Même si le commissaire n’a pas émis de rapport de carence, l’ICCI estime que la décharge reste valable sur la base des arguments avancés ci-dessus sous la rubrique «Le rapport de carence ». Les actionnaires disposaient de tous les éléments pour refuser l’approbation des comptes annuels et la décharge au commissaire. S’ils décident malgré tout de donner décharge au commissaire, celle-ci ne peut pas être remise en cause ultérieurement.

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